Apparence

- Poséidon s'éprit de Corcyre et la mena sur une île grecque pour l'engrosser comme un bonhomme, baptisant ainsi l'île Corfou, puis elle pondit Phéax qui donna son nom au peuple des phéaciens. Si Poséidon a choisit cette île, c'est parce qu'il la connaissait bien. Depuis l'archonte Alcméonide Mégaclès, descendant direct du fils de Poséidon, c'est un dieu qu'on vénérait vachement à chaque génération. On a vénéré un peu Apollon aussi, histoire d'avoir une certaine assurance, mais c'était surtout Lui. Bon, moi, personnellement, je préfère un tout autre dieu que ces deux-là et vu le nom que je porte, on sait très vite lequel. Eh, je ne suis pas mort foudroyé et je me suis même relevé une fois que je l'étais, c'est bien que ça ne le dérange pas tant que ça et que je lui fais bien honneur, au petit père. Bref, après ça, voilà Alcibiade, un autre alcménoïde, qui débarque un jour dans ma vie et me sort " Salut mec ! Regarde cette magnifique couronne ! Tu la veux ? Moi j'ai envie de crever, je suis au bout de ma mort !" Sur le coup je la trouvais jolie, sa couronne, et dans le pire des cas je pouvais toujours la revendre, alors je l'ai prise.
- Et après je l'ai eue !
- C'est ça.
- Zeus ! As-tu réellement employé le terme "engrosser" devant ton fils ???
- Ouais, pourquoi ?
- Comme un bonhomme !
- Ouaiiis c'est ça ! Un vrai de vrai ! Tape m'en une, bonhomme !
- Tu m'exaspères ! Zephyr, au lit !
- Mais maman !
- Sans discuter !

Zeus déploie ses deux mètres zéro neuf pour libérer le lit de son fils de ses cent vingt kilos de muscles épais, déliés, dessinés comme sur une statue de marbre glacé. Vous voyez l'armure d'un guerrier grec ? Il est cette armure, pas le gars dessous. Le marbre, il y fait penser parfois, lorsqu'il sourit. Il a tendance à beaucoup sourire, souvent, et c'est justement ce qui a tendance à le rendre inquiétant. On pourrait même dire qu'il est tel le prédateur qui montre les crocs. Pour qui le connait assez, plus vous voyez ses dents et plus vous avez de chances d'être dans une situation précaire. A vous de voir si vous souhaitez en sortir ou si vous préférez continuer de pousser votre chance. A l'inverse, s'il vous aborde avec sérieux, ou avec nonchalance, c'est qu'il ne tient pas nécessairement à se jouer de vous mais ces moments sont rares, intimes. Car Zeus est un homme qui a peur de ne pas sourire. Peur de perdre ce marbre qu'il a érigé sur son visage depuis de si nombreuses années. C'est devenu si facile pour lui d'afficher un sourire amical, de rire à gorge déployée, de tout faire pour masquer ses émotions que s'il devait arrêter, il serait probablement perdu. Terrifié.

Qui pourrait s'en douter, pourtant ? Lui qui est si grand, si musclé. Lui qui fait frissonner de désir et d'inquiétude mêlés. Lui qui a toujours le réflexe de baisser un peu la tête lorsqu'il passe une porte pour ne pas se cogner, même s'il reste facilement vingt centimètres entre l'encadrement de la porte et le sommet de sa tête. Un réflexe hérité d'années de vies passées où la moyenne était d'un mètre quatre vingt dix pour les ouvertures.

Personnalité

Vous le trouverez adorable, avenant, gentil, doux, serviable et il sera sûrement tout ça s'il le faut. Il l'est peut-être au fond mais il a presque oublié. Caché derrière son devoir de père, de chef de lignée, d'éducateur, de protecteur il est devenu lui-même l'armure en délaissant l'homme à l'intérieur. Blessez-le et il vous répondra d'un sourire, insultez-le et il secouera la tête avec amusement, attaquez-le et il rira face à votre emportement. Il ne ressent plus rien en surface, ce n'est que l'armure que vous entaillez mais là, derrière, c'est son cœur qui est lacéré.

Est-il toujours là ? Qui sait, un minuscule bout d'homme se balade peut-être derrière la carapace. Un petit bout de chou blond aux profonds yeux vert feuille calculateurs et pétillants, à la voix grave, basse à la Geoff Castellucci qui peut faire trembler de désir un homme, agitant avec un rire sa petite épée en bois face à un dragon imaginaire et qui crie "prends garde ! En avant vous autres !" alors qu'il joue seul.

Car seul, il l'a été depuis presque toujours. Seul face à sa maladie, seul à devoir apprendre à la contrôler, seul face aux psychiatres qui voulaient l'enfermer. Seul face au monstre qui l'a élevé. Atteint d'insensibilité congénitale à la douleur, héritée de sa mère, il n'a aucune terminaison nerveuse transmettant les informations de douleur qui fonctionne. L'information se perd, s'égare, disparaît et au fond, a-t-elle vraiment existée ? Il n'en a plus rien à faire. Comme on le dit si bien, "la douleur n'est qu'une information" et cette information, il ne l'a pas. Ne pas ressentir la douleur est un bonus dans son travail. Le seul inconvénient qu'il voit, lui, à sa situation, c'est qu'il doive ressentir la douleur du cœur.

Histoire

23 juillet 1870. Une domestique le met au monde sans un bruit, sans un son, accroupie face à la cheminée et accrochée aux pierres de l'âtre. Elle respire lentement, tranquillement, semble même prête à faire la conversation comme si de rien n'était. Elle se vide de son sang, elle sort enfin le bébé et coupe machinalement le cordon avec les dents. Elle éjecte le placentas avec indifférence et le met au feu puis, délaissant le bébé là, elle change de robe et retourne vaquer à ses occupations dans le palais. Le père de l'enfant ? Georges Premier de Grèce.

Le bébé ne dit rien, ne pleure pas, et ce n'est que plusieurs heures après qu'une autre domestique le trouve. On demande qui est la mère, on n'obtient pas de réponse. On demande qui est le père, grand silence. Bien vite on ne pose plus de questions, on le laisse avec la nourrice et l'autre enfant car oui ! Deux mois et demi plus tôt, dans ce même palais, naissait la fille légitime du roi Georges, Alexandra. Les deux bébés grandissent ensemble, c'est fou comme ils ont un air de famille didont ! Ils s'entendent bien, mais il y a un hic : le bébé ne pleure pas. Qu'il ait faim, qu'il se fasse mal, qu'il se blesse, qu'il saigne ou qu'il se cogne, il ne pleure jamais. Il a toujours un sourire sur le visage, comme pour dire "non, tout va bien !", un sourire qui aurait dû rassurer, mais qui ne fait qu'inquiéter l'entourage. Aux blessures succèdent les bleus, les blessures internes, l'enfant souffre visiblement mais ne pleure jamais. On murmure qu'il est l'enfant du diable, sinon pourquoi serait-il apparu près du feu infernal ? Et rapidement, à cinq ans, on l'écarte de son amie et on le confie à un médecin qui saura, apparemment, s'en occuper.

Xander Ebermann. Prussien de son état, pro-français qui a fuit la guerre en territoire allemand. Un homme sage qui cherche à préserver les liens du garçon avec la famille royale, lui permettant ainsi de rencontrer Elizabeth de Hesse-Darmstadt, la sœur aînée de celle qui deviendra l'épouse du dernier Tsar Nicolas II Romanov, ou le futur Constantin Premier de Grèce avec qui il grandit. Avec le temps il finit par davantage ressembler à sa mère, ce qui soulage inconsciemment les autres domestiques. Le petit garçon a besoin d'affection, de contact, d'autre chose mais en vain. Cette maladie lui donne une réputation de maudit. Bientôt on le rejette et il n'y a plus, dans sa vie, que les expériences d'Ebermann. Il lui fait faire des exercices, des tests, le scientifique veut savoir ce qu'il se passe, ce que l'enfant peut encaisser, jusqu'à quel point il peut souffrir et l'enfant souffre, oh oui il souffre ! Mais à l'intérieur seulement, son corps se remettant toujours en silence alors que son cœur se brise.

A vingt ans il n'y a plus rien à briser chez lui. Il connait les hôpitaux, la médecine et son corps par coeur. Petit-à-petit, alors que le scientifique se désintéresse de lui, il commence à apprendre la vie en dehors des quatre murs qu'il connait depuis tout petit et décide, par curiosité, de s'engager dans l'armée. Cette année-là, la Grèce devient un Empire et assiège Constantinople pour en faire sa capitale. Il découvre donc les turcs, les thraces, la Bulgarie et l'Anatolie puis le Liban, la Syrie, l'Irak et l'Arabie. Il apprend tout, voit tout, essaie tout. Son corps ne lui refuse plus rien, il apprend même à sourire et à rire.

A trente ans, Xander réapparaît dans sa vie pour lui présenter une jeune femme et lui soumettre une idée : faire de lui un vampire en échange d'un héritier portant sa maladie. L'idée de ne plus pouvoir aisément mourir, de continuer de parcourir le monde sans avoir de freins liés à son physique lui plait, et au fond un héritier, bof... Il accepte. La grossesse se passe, mais pour être sûr d'en avoir un rapidement Zeus décide de court-circuiter la femme proposée par Xander et de se faire, à la mode turque, un harem. La même année, il devient père de sept enfants : quatre filles et trois garçons. Sur les trois garçons, seul Zephyr est atteint clairement d'insensibilité congénitale à la douleur et Zeus s'en trouve soulagé. Enfin quelqu'un qui peut comprendre ce qu'il vit, ce qu'il ressent.

Il est déjà vampire lorsque son fils atteint sa première année, et comme le bébé apprend à parler et à marcher, lui apprend à manier ses pouvoirs. L'un d'eux se révèle à lui, cette capacité à entrer dans l'esprit des gens et le modifier à sa guise, et il délaisse bien vite ses autres dons pour s'occuper de celui-là. A la perfection. Avec Zephyr ils sont comme cul et chemise, s'adorant, se soutenant. Zeus n'avait jamais été aussi proche de quelqu'un, et naturellement à trente ans il enjoint son fils à faire comme lui. Un fils que le soleil lui prend quelques années plus tard, à peine vampire. Exposé de son plein gré au soleil, ce sombre abruti.

Zeus n'a plus de proche, plus d'attaches. Il regarde sa lignée lentement se créer, le monde évoluer, ses descendants se succéder. La chute de la Monarchie Grecque, des Romanov, les Première et Seconde Guerres Mondiales,... C'est durant cette fameuse première guerre qu'il commence à travailler, mais pas dans les champs, non. Dans le meurtre. Petit à petit, de mieux en mieux, il vend ses services au plus offrant. Pour une bouchée de pain il vous débarrasse de votre belle-mère, pour quelques roubles il abat une star, pour plusieurs euros il noie un président. Il est plus qu'excellent. Il est le meilleur.

Et il continue après la révolte des Vampires, se contentant après cette période de faire des études pour trouver un métier façade, et quel métier ! Un métier destiné selon lui aux menteurs, aux manipulateurs, aux arrivistes et aux escrocs : avocat. Là encore, il devient le meilleur ? Hum... pas tout à fait. Il a un rival. Un Requin. Mais il n'est pas effrayé par le Lutteur, bien au contraire. Il s'amuse souvent à prendre des cas s'opposant à ceux du Requin pour le plaisir de lui faire perdre un ou deux dossiers de temps en temps. Cela lui procure toujours une joie infinie, de faire tomber les plus grands.

Il y a quelques jours, il a reçu un courrier. Un petit courrier avec un nom dessus, et une somme. Il en a haussé les sourcils, regardé par sa fenêtre dans sa petite maison de campagne française, et lancé à son époux Philippe en train de s'amuser dans le potager un :
- Je retourne aux Etats-Unis, tu veux m'accompagner ?
Le nom de sa future victime ? Duncan Kennedy, tout nouveau Leader de Dornia. Un petit rire lui échappe. Ils n'ont pas compris dans cette famille que la politique ne leur siée pas ? Ah, au moins ce sera facile de l'approcher ! Le Leader précédent lui avait demandé de venir poser ses fesses au Conseil mais il avait souhaité y réfléchir. Maintenant, entre le Requin à aller ennuyer et le nouveau Leader à tuer... Et bien, il n'a plus de raison de refuser ! Comme on dit, le travail n'attend pas !